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Pouvez-vous
nous décrire un de vos derniers travaux de terrain?
La première condition pour conduire un travail de terrain fructueux
est de trouver les villages ou zones où des danses populaires
authentiques, improvisées, se déroulent, et où
le savoir pour créer de telles
danses reste vivant. À l'heure actuelle, ces endroits se font
rares.
Sur le terrain, après avoir trouvé les "informateurs"
sur la danse, la recherche nécessite au moins deux autres étapes.
La première est d'obtenir des informations sur les coutumes
de danse, les manifestations dansées, les types de danses et
d'identifier les meilleurs danseurs. Nous devons aussi trouver les
musiciens qui connaissent les mélodies et leurs accompagnements.
Puis nous nous mettons d'accord sur une seconde date une semaine ou
deux plus tard, pour revenir et faire les enregistrements - la seconde
étape. Ces personnes vivent généralement dans
de petits villages éloignés. Nous nous y rendons en
voiture avec notre équipement : caméra, vidéo,
appareils photo, magnétophones éclairages, et matériel
divers, un équipement lourd et encombrant. À la seconde
visite nous répétons l'organisation, mais cela prend
moins de temps. Les longs préparatifs culminent alors en ces
heures intenses durant lesquelles nous tournons et les danseurs -
parfois après beaucoup de persuasion, n'oublions pas qu'ils
sont âgés, très âgés - dansent. Mais
une fois lancés, vous ne pouvez plus les arrêter. Ces
manifestations artificiellement créées deviennent réelles.
Elles font renaître une mémoire cinétique oubliée,
liée à des émotions plaisantes. Le plaisir de
danser est inspiré par la mélodie fascinante, les autres
danseurs, le public, les habitants du village qui se réunissent,
mais aussi par une inspiration également importante du au vin
et eaux-de-vie...
La suite des travaux est moins romantique. Les films sont développés,
puis catalogués et stockés avec les enregistrements
sonores dans des réserves avec air conditionné. Si les
résultats du travail de terrain doivent être publiés
et analysés, les danses sont notées. Lors du travail
de terrain il n'est pas possible de demander au créateur/interprète
(le paysan danseur) de répéter exactement ce qu'il ou
elle a fait la minute précédente pour noter sur place.
Nos danses populaires, comme la plupart des danses du bassin des Carpates,
sont par nature improvisées, leurs tempi vont de allegretto
à presto, et elles sont généralement complexes
dans l'utilisation du rythme et du corps.
Nous notons donc ultérieurement, hors de l'action sur le terrain,
d'après les enregistrements en film ou vidéo. Pour regarder
les films et analyser les mouvements mon équipement préféré
est une table de montage de film, où l'on peut explorer la
séquence dansée à différentes vitesses,
ou image par image, et se déplacer dans la séquence
avec facilité. L'écran est de bien meilleure qualité
que celui d'une télévision ou d'un moniteur, et est
moins fatigant à regarder durant des heures. |
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