notation du mouvement
http://notation.free.fr

 
CONTEXTE QUESTIONS A ELÉONORA DEMICHELIS
 
Eléonora Demichelis, choréologue.
 
Eléonora, quel a été votre premier contact avec la notation du mouvement?

C’est à l’école, à la “John Cranko Schule” de Stuttgart en Allemagne où j’ai reçu ma formation de danseuse que pour la première fois j’ai appris ce qu’était le métier de choréologue. En effet, Georgette Tsinguirides, qui dès 1966 a noté les chorégraphies de John Cranko et les a remonté dans le monde entier, venait nous transmettre avec passion, variations et extraits de ballets dans le cadre de nos cours de répertoire.
J’étais fascinée par l’idée qu’une personne, à l’aide d’un support écrit, puisse garder en mémoire avec autant de facilité et d’acuité le répertoire d’une compagnie comme le Stuttgarter Ballett.
À la fin de mes études, j’ai eu la chance d’être engagée dans différentes compagnies allemandes et de m’épanouir en tant que danseuse dans l’interprétation de ballets classiques, néo-classiques, contemporains et danse-théatre.
Après huit ans de vie professionnelle, j’ai dû envisager une reconversion, mais mon souhait était de rester dans le milieu artistique de la danse.
Me souvenant de l’admiration que j’avais ressentie pour Georgette et pour son rôle tenu au sein de la compagnie, j’ai donc décidé d’apprendre la notation Benesh au Conservatoire de Paris.
 
Comment se déroule la formation au Conservatoire de Paris?

Pendant les deux premières années d’études, j’ai découvert et appris le système d’écriture. J’ai tout de suite été fascinée par sa logique, sa subtilité et son efficacité et, sans même que je m’en aperçoive, j’ai gagné peu à peu un regard plus pertinent du mouvement.
Parallèlement aux cours théoriques, j’ai bénéficié, grâce à la structure du Conservatoire, d’une mise en pratique immédiate à travers la lecture d’exercices de cours classiques et contemporains des professeurs de la maison, de variations de Matt Mattox et de Bruce Taylor ainsi que de partitions chorégraphiques très variées : Robert North, Jean-Christophe Maillot, Angelin Preljocaj, Frederick Ashton, Kenneth MacMillan pour ne citer qu’eux.
J’ai également eu l’opportunité de fournir une partition d’exercices de Peter Goss notés pendant ses cours, ou encore de noter une variation de Susan Alexander.
Sans oublier la formation musicale conduite par Sophie Rousseau où les étudiants des deux notations du mouvement Laban et Benesh se retrouvent.
Ce fut un enrichissement continu.
 


Vous obtenez votre diplôme de formation supérieur et pourtant vous décider de prolonger les études par un cycle de perfectionnement. Quelle en a été la motivation?
Je n’avais qu’une envie : appliquer ces nouvelles connaissances dans le milieu professionnel tout en bénéficiant du soutien actif du Conservatoire de Paris et de l’échange privilégié avec mon tuteur.
Ainsi j’ai pu vivre ma première expérience professionnelle dans la compagnie de l’Aterballetto (Italie) : Mauro Bigonzetti, directeur de la compagnie, m’a autorisé à noter sa création “Sogno di una notte di mezza estate”. Au fur et à mesure des répétitions, je prenais au vol un maximum d’informations et petit à petit, j’ai réalisé une première partition de travail de la pièce.
De retour à Paris, l’échange avec mon tuteur, Eliane Mirzabekiantz, m’a permis de peaufiner la notation en mettant en valeur l’essence de la chorégraphie. Cette partition est maintenant en consultation à la bibliothèque du Conservatoire de Paris et de l’Institut Benesh à Londres.

 

À peine votre projet de notation fini, vous êtes engagée comme choréologue par Uwe Scholz à Leipzig. Quelles en ont été les circonstances et quel a été votre rôle?

Le poste de choréologue à la Compagnie de Leipzig devenait vacant. J’ai immédiatement postulé et après avoir passé une semaine avec la compagnie, j’ai obtenu le contrat. J’ai bénéficié de l’accueil chaleureux de Tatjana Thierbach, choréologue de Uwe Scholz depuis 10 ans. Dès le premier jour, j’ai été confrontée à la notation d’une nouvelle pièce de Uwe et, parallèlement, je découvrais les archives d’une trentaine de ballets notés.
Pendant un an et demi, j’ai essayé d’apporter mon aide aux maîtres de ballet pour remonter une dizaine de pièces, de faire répéter les remplaçants pour assurer l’intégralité des répétitions (dans une compagnie de 50 danseurs, il y a malheureusement souvent des malades et des blessés), d’aider le chorégraphe en prenant note des corrections pendant les répétitions sur scène pour, ensuite, les transmettre aux danseurs.
J’ai aussi pu assister Patricia Neary et Nanette Glushak venues remonter trois ballets de George Balanchine.
J’ai noté deux créations de Uwe Scholz et un ancien ballet déjà dans le répertoire de la compagnie ainsi que la soirée “Hommage à Balanchine”.
Bref, la vie d’un notateur en compagnie.
J’ai acquis, d’une part, la confiance en mes capacités de répétiteur et de choréologue et, d’autre part, j’ai gagné la confiance des danseurs et de la direction.
 
Après deux ans à Leipzig, vous décidez de revenir sur Paris.
Quentin Rouillier, directeur des études chorégraphiques au Conservatoire de Paris m’a engagée pour enseigner des extraits de “La Valse” de Frederick Ashton dans les cours de répertoire de Jean-Claude Ciappara. Cela a été un plaisir de découvrir ce chorégraphe à travers la notation et, grâce au soutien de Jean-Claude et à la complicité qui s’est créée, les répétitions se sont très bien déroulées d’autant que les danseurs y ont montré un vif intérêt.
La réussite de mon examen de fin de perfectionnement a été la bonne conclusion d’un apprentissage qui m’a ouvert une nouvelle voie et une nouvelle passion dans le monde de la danse.
 
Entretien fait en décembre 2002